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A la rencontre de Ana Catharina Santos Silva

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Journée Internationale des droits des femmes

D’origine brésilienne, Ana Catharina Santos Silva est arrivée en France pour des études d’anthropologie et de sociologie à l’université d’Aix Marseille. Elle s’est redirigée ensuite vers une faculté d’anglais-LLCE où elle a obtenu un master sur la littérature américaine, puis une thèse à l’université du Mans sur l’Art et la politique des afro-américains à Los Angeles. Elle a rejoint l’université de Tours en 2021 sur un poste d’ATER. Nous la rencontrons à la faculté des Tanneurs.

Un évènement marquant dans votre vie professionnelle?
« Quand je suis arrivée à Aix-Marseille, les affichages des syndicats présentaient le fait que les femmes étaient davantage maîtresse de conférence que professeure. La contrainte de l’enfantement était prégnante. Une autre occasion m’a permise d’assister à une remise de diplômes d’ingénieurs et de constater l’absence frappante des femmes, ce qui n’est pas le cas au Brésil. »

Votre projet lorsque vous étiez enfant?
« Beaucoup de femmes de ma famille étaient enseignantes. Ma grand-mère paternelle de 101 ans a toujours été enseignante et a œuvré pour l’alphabétisation des personnes souffrant de troubles de l’apprentissage. Ses deux sœurs également. L’enseignement a toujours était très valorisé au Brésil et dans ma famille. J’ai toujours adoré l’école car il y avait de l’ordre et j’adorais les langues. J’ai commencé à lire seule le portugais et j’ai très tôt su que je voulais un métier de réflexion. »

L'évolution de l’égalité au sein de l’enseignement supérieur :
« La surreprésentation masculine est très visible et je ne vois pas forcément d’évolution flagrante. Et je m’interroge sur ces phénomènes. Ce que je constate c’est que certains secteurs sont désertés par les femmes et je ne vois pas de changement. En revanche, je perçois des mixités d’origine géographique plus que de mixité de genre. Les discriminations remontent bien avant les études selon moi et les éducations données aux jeunes filles ne les invitent pas forcément à prendre la parole et à s’affirmer alors qu’elles travaillent bien et ont des choses à dire. »

Quels conseils pourriez-vous donner aux autres jeunes femmes ?
« Parfois, il faut sortir de sa zone de confort et s’interroger sur les zones inexplorées de notre personnalité pour sortir de la case dans laquelle on nous a mise. Explorer d’autres secteurs et ne pas hésiter à tenter des mobilités, quel que soit la situation personnelle et amoureuse ! La recherche de l’autonomie économique et le soutien familial sont importants pour permettre également la poursuite d’études longues. »

Une idée pour améliorer l’égalité à l’université de Tours et ailleurs?
« Je n’ai pas beaucoup de recul sur le fonctionnement de l’université de Tours car je n’y suis que depuis peu de temps. Je remarque toutefois qu’il y a très peu de femmes aux postes de pouvoir et donc très peu de femmes présidentes de l’université. La présence de modèles féminins est pourtant très importante et je remarque que la maternité est parfois un frein à la carrière notamment dans l’obtention de la HDR dans l’enseignement supérieur. La charge mentale doit être prise en compte et le fait d’avoir des enfants ne doit pas seulement incomber aux femmes. Les enfants devraient être pris de manière plus collective, même au niveau de la société car ce sont de futurs citoyens. Hors l’allaitement, il n’y a aucune raison d’attacher l’enfant à la figure maternelle. »

C’est quoi l’égalité femmes-hommes pour vous ?
« Savoir qu’il n’y a pas de contraintes invisibles pour qu’on puisse aller là où on souhaite. Les souhaits peuvent être multiples pour toutes et tous. YOU CAN BE ANYTHING, sans plafond de verre. Il faut malgré tout selon moi des mesures affirmatives pour pousser l’égalité.»

Une anecdote sur l’égalité?
« Très souvent, les hommes se montrent incrédules face aux démarches sur l’égalité. J’ai l’impression que les gens relativisent les inégalités car on est en France. Cela est d’autant plus troublant qu’on est face à des personnes éclairées et ce n’est donc pas recevable. Autre chose, cette fois au Brésil : j’ai une cousine qui est professeure d’histoire à l’université et lors de son arrivée, et qu'on la présentait, un employé a demandé de qui elle était la femme au professeur qui lui faisait faire le tour!

Vous diriez quoi à l’enfant que vous étiez ?
« Il ne faut pas avoir peur des garçons, il ne faut pas te laisser intimider. »